La précarité et ses conséquences dans l'enseignement musical

Ici, on parle pédagogie.
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Zaphod
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Re: La précarité et ses conséquences dans l'enseignement musical

Message par Zaphod »

Les excellents musiciens certes ne manquent pas, mais quid des excellents pédagogues ?

Par exemple tu connais combien de profs capables de faire une étude posturale complète d'un violoniste, pour adapter sa mentonnière, sa barre d'épaule, sa tenue d'archet, son ouverture d'épaule, son angle de violon etc en fonction de sa morphologie et d'éventuelles pathologies ? Tu connais combien de profs capables d'enseigner à un élève dyspraxique ET dyslexique, et d'arriver à le faire progresser au même rythme qu'un élève normal ? Ou encore un prof capable d'aborder le répertoire chinois ou norvégien sans perdre en qualité de jeu et de son ?

Sans parler des interactions humaines...
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Pallasite
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Re: La précarité et ses conséquences dans l'enseignement musical

Message par Pallasite »

Zaphod a écrit : sam. 24 oct. 2020 23:05
Personnellement je n'ai jamais fais tant de sacrifices pour me former en tant que violoniste (je n'ai d'ailleurs jamais été un grand violoniste même avant d'être malade), en revanche je l'ai fais pour me former en tant que prof.
Je crois que c'est ça que beaucoup de personnes ne le réalisent pas.

Apprendre jusqu'à devenir excellent dans quelque chose, c'est la partie facile. Apprendre à la transmettre c'est une autre paire de manche. Évidemment, il est illusoire de transmettre quelque chose que l'on ne connait pas/mal mais il est tout autant illusoire de croire pouvoir transmettre sans s'être formé spécialement à la transmission.

Je vais prendre un exemple en dehors du violon, dans le domaine scientifique. Il y a des prix Nobel de physique tous les ans, il n'y a qu'un Richard Feynman. Et je t'assure qu'en tant que biologiste (et pas du tout en biophysique donc ma physique elle est d'un niveau pas très glorieux), je rêverai d'une discussion avec Feynman, pour discuter enseignement et voir comment je pourrais développer ma capacité à enseigner à son niveau.

Et c'est d'ailleurs assez marrant de voir que dans une certaine mesure, ce que tu enseignes ne comptent plus vraiment pour discuter enseignement. Un de mes enseignants utilisait pour enseigner des techniques qu'il avait appris au football (il enseigne aussi le foot ;) ). J'ai beaucoup appris d'un ancien enseignant de chirurgie cardiaque. Parce que même si chaque discipline a ses particularités, on apprend toujours beaucoup de quelqu'un qui enseigne autre chose, qui a souvent une autre philosophie et qui utilise souvent d'autres techniques.
Dernière modification par Pallasite le dim. 25 oct. 2020 10:04, modifié 1 fois.
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Zaphod
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Re: La précarité et ses conséquences dans l'enseignement musical

Message par Zaphod »

Effectivement, dans l'enseignement il y a toujours 2 paramètres : l'information transmise, et la façon dont elle est transmise. Les deux sont indissociables...
Un violoniste aussi bon soit-il sera incapable d'enseigner s'il ne sait pas comment transmettre son savoir, de même qu'un grand pédagogue sera incapable d'enseigner une technique violonistique s'il ne l'a maîtrise pas lui-même au point d'en comprendre les fondements et aboutissants.
Et ces 2 qualités s' acquièrent totalement différemment et indépendamment l'une de l'autre, c'est malheureusement pourquoi il y a beaucoup de profs inadaptés, notamment dans les conservatoires (où on leur enseigne à jouer mais pas à enseigner).
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Re: La précarité et ses conséquences dans l'enseignement musical

Message par Melehad »

Pour rebondir sur la précarité / la répartition des profs sur le territoire :
Autour de Blois, j'ai fait plusieurs sites, écoles et demandes pour trouver un prof dans une association, pour respecter mon budget.
Il y avait aussi une piste en cours particulier à 22 euros de l'heure à Blois.
Mais ça reste quand même limité chez moi pour des cours adultes. Et ma prof en asso doit pas être payé des mille et des cents... je ne lui ai pas demandé cela dit.
C'est très disparate sur le territoire et je peux comprendre que certains profs ne vivent pas de leurs cours correctement.
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Zaphod
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Re: La précarité et ses conséquences dans l'enseignement musical

Message par Zaphod »

Après si on limites le budget, forcément ça limite aussi le choix des profs...
A petit budget tu vas trouver soit des étudiants souvent en fin de cursus conservatoire qui n'ont aucun recul sur la pratique et l'enseignement du violon, ou bien soit des profs auto-proclamés en campagne, qui ont parfois appris le violon en autodidacte, et je te fais pas un dessin sur le résultat...

Actuellement j'enseigne dans une seule structure, de type associative, ayant refusé les autres soit car soit la liberté pédagogique est trop restreinte (conservatoires), ou soit la rémunération n'est vraiment pas sérieuse (j'ai été démarché par des écoles de musique associatives qui proposaient environ 7€ de l'heure, et aucun défraiement de déplacement ni rien...). En toute transparence je suis payé 25€ de l'heure, ce qui n'est pas beaucoup mais déjà largement supérieur à la très grande majorité des autres structures tous types confondus. Du coup forcément pour les élèves ça revient à minimum 30€ le cours, soit plus de 1500€ par an par élève pour un cours hebdo, pas à la portée de toutes les bourses...
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Re: La précarité et ses conséquences dans l'enseignement musical

Message par IFred »

25€ c'est presque le minimum à Paris (hors étudiant).... pourquoi tu parles de (30€ après).
Tu es payé comment (je veux dire tu es "salarié" , auto entrepreneur etc)
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Re: La précarité et ses conséquences dans l'enseignement musical

Message par Zaphod »

IFred a écrit : lun. 26 oct. 2020 14:50 25€ c'est presque le minimum à Paris (hors étudiant).... pourquoi tu parles de (30€ après).
Tu es payé comment (je veux dire tu es "salarié" , auto entrepreneur etc)
25€ en structure, pas en cours particulier. Même dans un conservatoire tu n'es pas payé autant.
Puis sur Paris les prix ne sont même pas comparables... Ici je loue une maison de 120m² avec 8 hectares de terrain, 750€ par mois, combien ça couterait sur Paris ? Si on ramène le salaire aux dépenses, j'ai pas à me plaindre.

Je parle de 30€ car si je touche 25€ il faut bien payer des cotisations, donc l'élève dépense plus que ce que je gagne.
J'ai plusieurs status (auto-entrepreneur et salarié multi-employeur, sans parler de mon statut d' handicapé qui change des choses aussi).
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Re: La précarité et ses conséquences dans l'enseignement musical

Message par akphung »

Je suis en train de payer 100 CHF( env. 95 euro)/h pour le professeur de ma fille. Les musiciens en Suisse ont encore la chance de pouvoir exercer le métier dans une bonne condition.
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Re: La précarité et ses conséquences dans l'enseignement musical

Message par IFred »

Je parle de 30€ car si je touche 25€ il faut bien payer des cotisations
Ok donc c'est bien en micro entrepreneur 32 brut => 25 net ( 22,3%) cotisation .. le bonheur
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Re: La précarité et ses conséquences dans l'enseignement musical

Message par IFred »

akphung a écrit : lun. 26 oct. 2020 19:35 Je suis en train de payer 100 CHF( env. 95 euro)/h pour le professeur de ma fille. Les musiciens en Suisse ont encore la chance de pouvoir exercer le métier dans une bonne condition.
C'est env le tarif des profs d'une certaine stature à Paris aussi
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Re: La précarité et ses conséquences dans l'enseignement musical

Message par Zaphod »

IFred a écrit : lun. 26 oct. 2020 20:53
Je parle de 30€ car si je touche 25€ il faut bien payer des cotisations
Ok donc c'est bien en micro entrepreneur 32 brut => 25 net ( 22,3%) cotisation .. le bonheur
C'est à peu près le double de ce qu'on gagne en conservatoire, avec la liberté pédagogique en prime.
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Re: La précarité et ses conséquences dans l'enseignement musical

Message par IFred »

mm en conservatoire je n'ai plus la grille en tête pour les titulaires (c'est une donnée publique) mais ca doit commencer à qq chose comme 1700 brut* et aller jusqu’à 3000 qq chose au denier échelons.. en mensuel, 12 mois par an.. covid ou pas covid , congé payé à raison 24h max/semaine
Ca fait bien plus que 12,5€/h..


*brut @ 15% contre 22% pour les autres salariés et 56 %+ pour les independants/artisant etc..
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Re: La précarité et ses conséquences dans l'enseignement musical

Message par Zaphod »

Il y a de moins en moins de titulaire, maintenant c'est contrat à l'année, du coup pas payé pendant les vacances.
Et 1700 brut pour combien d'heures ?
À 20h par semaine, 25€/heure ça tourne déjà à plus de 2000 net par mois...
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Re: La précarité et ses conséquences dans l'enseignement musical

Message par Alain44 »

Comme dans tout domaine d'enseignement "à l'heure" pour arriver à un mensuel (ou mieux un annuel comme aux US),
il faut globaliser le travail réalisé.

Le "présentiel" (les heures effectives avec les étudiants-élèves) correspond à une part variable du total du travail effectué.

Il y a les "préparations-corrections", les réunions d'équipe ou de coordination, jurys, les tâches administratives, les tâches de représentation-communication ...

Suivant chaque domaine, établissement... et aussi sérieux-implication de l'enseignant ;) les tâches hors présentiel sont ... variables ...
On ordre de grandeur moyen (mais très variable suivant les situations) est qu'il y a autant d'heures en présentiel que hors présentiel.

L'importance variable des tâches hors présentiel rend difficiles les comparaisons, bien quelles soient indicatives et intéressantes. ;)


Je remarque que ce n'est pas si loin des tâches effectués par un luthier (qu'avait abordées Ifred une fois): compter toutes les heures passées, en représentaion-communication et tâches diverses, pour juger de la "cherté" du travail d'un luthier (fabrication, entretien, revente....)... ;)

Dans tout métier, il y a "ce qui se voit" et "ce qui ne se voit pas" par l'observateur lambda.
Cheminer ou arriver: quel est mon but ? La musique est un chemin infini... ;)
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Re: La précarité et ses conséquences dans l'enseignement musical

Message par IFred »

Alain44 a écrit : mar. 27 oct. 2020 06:22 il y a autant d'heures en présentiel que hors présentiel.Dans tout métier, il y a "ce qui se voit" et "ce qui ne se voit pas" par l'observateur lambda
Je suis assez familié avec le temps réels de travail dans l'enseignement pour voire la différence entre le temps hors présentiel et comparer par exemple celui dans l'enseignement supérieurs et dans l'enseignement du violon.Franchement cela n'a pas quand même pas grand chose à voire hein...
Par ailleurs comme tu le dis dans de nombreuses professions tu à la même choses y compris ceux qui sont a 40h+ par semaine...

Enfin ici ma remarque était surtout pour comparer deux modes d'exercer la même profession.
oui À 20h par semaine, 25€/heure ça tourne déjà à plus de 2000 net par mois =
> mais payé pendant les vacances, quand tu es malade etc.. donc tu retires 4 mois par ans ou ajoute 33%
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