Chanterelle a écrit :
Je rectifierais quelque chose quand même:si l'on est pas pris par la curiosité et si la patience de lire les traités cités plus haut nous effraie car c'est fastidieux,alors je comprends la réaction de Renaud.Mais tout est dit dans ces traités,même la manière de poser l'archet sur la corde est décrite avec précision par Tartini,Léopold Mozart ou l'Abbé le Fils.
On sait comment on jouait à l'époque ,ou plutôt,on peut s'en faire un idée précise.
Bien sûr Bach est toujours magnifique,même joué à l'accordéon !
Le prélude en MI M a été orchestré par lui-même et les fugues de ses sonates et partitas pour violon seul se jouent aussi au luth ou à la guitare.
Est-ce une raison pour ne pas respecter ses manuscrits ?
Sans être un ayatollah du violon baroque,je respecte ceux qui ont osé faire la démarche vers les manuscrits,les partitions originales,et les traités de l'époque.Ils se sont heurtés à de véritables murs ,à une opposition systématique et bornée de ceux qui ont eu peur de se voir privés de tout l'espace musical baroque,comme Isaac Stern par exemple.
Aujourd'hui,plus personne n'ose jouer les "Quatre Saisons" sans mettre au moins des cordes en boyau sur les instruments.
Mais il est vrai que l'instrument importe moins que la musicalité,la personnalité du musicien et la façon dont il sait rendre la partition intéressante ou non....Là,nous nous rejoignons,n'importe quel instrument dans des mains compétentes peut nous donner l'émotion et c'est là l'essentiel.

Je dois dissiper quelques malentendus. Tout d'abord, même si je n'ai pas lu tous les traités, j'en ai lu certains (Geminiani, Leopold). Je conteste juste l'affirmation que "tout est dit dans les traités" et qu'ils permettent de se faire "une idée précise de comment on jouait". Vous connaissez beaucoup de traités qui permettent de se faire un idée de comment on jouait au XXème siècle? Jusqu'à un certain point, oui. Mais après... Est-ce qu'on trouve ce qui fait la différence entre une exécution propre techniquement et une exécution qui nous tire les larmes?
Depuis que j'ai prêté mon "Léopold", je n'ai pas eu le loisir de m'y replonger (on ne me l'a pas rendu!). Certes c'est important de savoir que l'on jouait sans mentonnière, de voir les illustrations de la "bonne position du violon", etc. Mais, précisément, "tout" n'est pas dit. Toutes le ornementations recensées sont une bible, mais l'art de les utiliser au bon moment, c'est dans la pratique, dans l'expérience, dans l'écoute. C'est très important de connaitre ces traités, et très instructif. Mais, par exemple, se limiter au coups d'archets de Muffat lorsqu'on tombe sur une mesure à trois temps me parait idiot. Les méthodes sont faites pour ceux qui apprennent! Très souvent on y trouve des choses basiques que l'on remet en cause avec l'expérience selon la pièce, la fonction de chaque note, etc...
De plus, il est difficile de savoir si une méthode est originale par rapport à ce qui se pratique, "avant-gardiste", ou si elle est dans l'air du temps. Je suis parfois très critique sur ce qu'on enseigne dans nos conservatoire, concernant l'archet, par exemple, et je déplorerais que l'on cherche à imiter ça dans trois siècles, sous prétexte d'authenticité en voulant jouer le concerto de Dutilleux.
Personnellement, je travaille les sonates et partitas sur la base du manuscrit original. Par contre, si je n'arrive pas à faire une grande liaison, je préfère couper l'archet, plutôt que ça sonne moins bien. Je précise au passage que les manuscrits ne sont pas connus que des baroqueux.
J'ai entendu une fois un enregistrement de quelqu'un qui prétendait avoir reconstitué la "technique de Paganini", à partir des illustrations, des témoignages, etc... Le résultat? C'était peut-être un bon chercheur musicologique, mais pas un bon violoniste. Il ne faut pas oublier le reste: La technique de Paganini, sans son hyperlaxie, ses grandes mains, son charisme, son oreille, que reste-t-il de l'authenticité?
Ceux qui se sont opposés aux musiciens baroques? A priori, je trouve qu'ils sont idiots si c'est pour des raisons de carrière. Mais si personne n'ose jouer les quatre saisons sans un mi boyau, n'est-ce pas tout aussi idiot? Si c'est un dictat contre un autre dictat, la question ne m'intéresse plus. On n'est plus dans une réflexion musicale. Et tous ceux qui pratiquent le baroque ne sont pas des anges désintéressés. Les baroqueux les plus intéressants, les plus sincères, que j'ai cotoyés ne sont pas forcément les plus connus.