Violon personnalisé :(

[LionelB]

Bonjour

J'aurais besoin de vos conseils éclairés. Je vous dirai ensuite de quel coin très reculé il provient je vais aussi essayer de tester mes très faibles connaissances.

Voici les photos :













Et voici mes questions ainsi que mes tentatives de réponses

À regarder ses chocs patinés je dirais ancien, peut être mi ou fin 19ème ?

Je pense que la table d'harmonie est en épicéa. Je trouve aussi le vernis de bonne qualité vu l'état de la bête ?

Sur ce point il ressemble beaucoup à mon allemand 18e. J'interprète ca comme un signe de qualité du violon. À l'inverse la touche ne semble pas en ébène du coup cela penche vers un violon de moindre qualité. Peut être un Arlequin ?

La table semble fendu. Cela vous semble t il réparable ? (Perso la aucune idée).

Que pensez vous du dos ?

Certaines zones ressemblent à de l'érable ondé quand d'autres ont des lignes verticales surprenantes. Du coup je me demande si on voit de l'érable, avec beaucoup d'usure et des couches de vernis mal faites qui font ces grandes verticales ? Ou alors un autre bois vernis imitation érable avec des zones entières usées de ce faux motif ?

Quand aux gravures sauvages des côtés (c'est à la fois le charme de ce violon et en même temps un véritable crève cœur). Avez vous déjà vu de pareils ornements ? Surtout qu'ils semblent post-fabrication.

Il n'a pas d'étiquette mais un gravage sur le talon. Peut être fait de la même façon que les côtés ? Difficile à lire. Cela vous dit quelque chose ?

Pour la mentonnière cela correspondrait à quelle époque ? Début 20ème ?

Pour le type de fabrication, vous diriez quoi ? Modèle Français ?









Pour l'archet (décidément le propriétaire aimait bien graver ses instruments !), ce type de gravure vous parle ?

ce type de bouton est il connu ? Et cela correspond t il a une époque spécifique ?

Merci de votre aide

[Marc Genevrier]

Rapidement, parce que je ne suis pas très bon dans ce genre d'exercice.
Je vois un allemand assez médiocre autour de 1900. Je n'aime pas ce genre de vernis, que je trouve triste, mais ça n'engage que moi. Dans tous les cas, ça ne me semble pas être un beau vernis artisanal, mais bien un banal truc des fabriques allemandes de l'époque.

Les gravures sur les éclisses et au talon sont l'oeuvre d'un propriétaire et postérieures à la fabrication. Donc aucune piste d'identification à y chercher.
Le bouton de l'archet me conforte dans l'idée que c'est allemand, ainsi que la forme de la hausse au niveau du dégorgement, entre le passant et la baguette. Par contre, les marques XX // que tu vois sous la baguette, ce sont des repères faits au moment de la fabrication. On en trouve sur pratiquement tous les archets industriels anciens, mais elles sont normalement cachées par la garniture et la poussette.

Le fond est bien en érable. Les stries verticales sont simplement les veines du bois, les cernes annuels. On ne les remarque pas toujours autant, mais elles sont bien toujours là. Ici, on les voit bien sans doute à cause de la nature du vernis et parce que le bois est peu ondé. Quand les ondes sont bien marquées, l'oeil se focalise dessus et remarque moins les veines verticales.
Je ne vois pas a priori de fente sur la table, ou peut-être sous le cordier du côté du mi. Il faudrait regarder en vrai.

[LionelB]

Merci pour ces infos. J'ai déjà appris plein de chauses .

Pour les marques de gravures je cherchais pas une identification de luthier mais plutôt de groupe ethnique. Comme par exemple des bretons ou des juraciens qui seraient connu pour avoir gravé des violons.

Pour la table je vois une ligne entre le cordier et la touche qui correspond à la jonction entre les 2 pièces qui la constitue. Elle semble aussi avoir une légère dépression d'où mon sentiment de cassure mais c'est peut être une erreur.

[Nicolo]

Je te suis complètement Marc sur ce que tu as dit.
J'ajouterai que je n'ai jamais vu ce type de marques sur des éclisses sur un seul violon, aucun auteur et aucune école n'a produit cela. D'ailleurs, dans cet excès et, il faut bien le dire dans le "massacre" fait au violon, je ne vois aucun luthier capable d'infliger cela à un instrument qu'il vient de finir, c'est au-dessus de nos forces.
J'ai lu le mot "arlequin" quand il s'agissait de la touche dans un bois autre que l'ébène. On n'utilise ce terme que lorsque l'une des parties principales (table, fond ou tête), n'est pas de la même époque. Rien à voir avec les accessoires comme la touche, ni la nature du bois.
Enfin, si on voit si bien le fil du bois, c'est parce que le fond est d'une pièce et forcément sur un côté (le gauche ici) pratiquement sur couche ; le fil est alors couché et plus large. On voit d'ailleurs bien les ondes sur tranche à droite plus marquées qu'à gauche, sur couche.

[LionelB]

Ok merci je comprends mieux le terme Arlequin et les raisons de ce fond particulier.

Je conçois que personne de censé ne massacrerai un Violon comme cela. C'est difficile à imaginer pour un luthier mais je crois que même un joueur ne pourrait pas se résigner à faire ca à son instrument. Alors je me demande si dans certaines régions reculées, certains n'avaient pas quand même ce type de pratique. En fait il m'a fait de la peine ce pauvre Violon. J'ai failli utiliser le terme de scarification pour décrire son traitement

Un ami pense l'acheter comme object de deco et me propose de me le revendre (au même prix) s'il pense que je peux le faire remettre en état pour le jouer. J'attends de l'avoir en main pour décider. Mais du coup vos analyses m'intéressent. sans compter que la lutherie m'attire de plus en plus donc c'est un bon moyen d'en apprendre un peu plus.

[Djuj]

Alors je me demande si dans certaines régions reculées, certains n'avaient pas quand même ce type de pratique.

Je pense que dans la pratique populaire du violon, l'instrument était bien moins sacralisé que dans l’approche savante de la musique.
J'en ai vu avec le nom du proprio gravé au dos, en bien gros. Certains violoneux personnalisaient leur violon selon leurs besoins (par exemple, un montage de cordes Ré La Mi Mi) sans se poser de questions, ou encore se vantaient d'utiliser du câble de frein de vélo pour la corde de Sol.
Bref, une approche assez désinvolte de l'instrument, voir même "punk" en jouant la provo, pour bien se différencier d'une autre pratique musicale considérée comme bourgeoise. D'où ce genre d'OVNI.

[Djuj]

Ah, j'ai trouvé à quoi ça me faisait penser : aux motifs qu'on trouve sur les touches et les cordiers des violons norvégiens (Hardanger).

[LionelB]

Effectivement en tapant ca dans Google, voir même Hardingfele, on trouve des visuels "approchant". Bien sûr point de vue qualité cela n'a rien à voir mais dans l'approche on sent quand même une demarche similaire.

[LionelB]

Après quelques recherches sur les violons traditionnels en France j'ai trouvé ce site :

http://www.lamaisonduviolon.net/Pages/labo.html

C'est intéressant et la 1e photo montre des violons personnalisés par gravure même si ce dont des cas différent de celui ci.

Pour info ce violon provient d'une succession en corse. Mais je n'ai rien trouvé sur des pratiques corses correspondantes. Quand Fred en aura fini avec ses petites collines peut être en saura t il plus sur les pratiques du violon corse traditionnel

[Djuj]

Pour la pratique populaire du violon en Corse, tu peux contacter Bernardu PAZZONI : https://myspace.com/bernardupazzoni
Il pourra peut-être te renseigner, pour peu que ce soit en rapport avec une pratique avérée et pas juste un coup de folie d'un individu isolé !

[LionelB]

Ok merci des que je l'ai en main je le contacte.

[M_Henry]

Simpa les éclisses je pense à un allemand ( les ouïe courtes) niveau âge , je trouve qu'il y a un infime rapprochement avec Collin mezzin donc fin 19 ème- début 20 ème

[M_Henry]

Par contre corse , c'est marrant, j'aurais vraiment cru à un allemand

[LionelB]

Le fait de le trouver en corse ne présume pas de son origine. c'est sûrement un allemand "modofié" (pour être gentils) en corse.

[LionelB]

Suite et fin de l'histoire :

J'ai eu en main le violon. Avec mon amis corse on a été voir mon luthier et il s'avère que c'est un français Mircourt environ 1920-30. Pas un très bon d'ailleurs. Les gravures n'ont pas endommagées la structure mais par contre ce que l'on voit sur la photo, c'est bien une fracture de la table. À environ 1mm sur la droite du joint. Il y a aussi une fracture d'âme mais quasi invisible. Sans le luthier, celle la je ne la voyais pas. Pour finir la mentonnière a été trop serrée et l'eclisse a éclatée.

Vous aurez compris... Il va finir comme objet de Déco.

Petite anecdote : sur les photos mon luthier m'avait dit quand les ouïes sont abîmées comme ça, c'est souvent le signe qu'une sourie à fait son nids à l'intérieur et qu'elle a élargie le trou après inspection, les poils ne laissent pas de doute rien ne lui aura été épargné !