Jeu en public accompagné

[Theo]

Salut tout le monde,
Sujet qui ne me semble pas avoir été traité et qui m’a récemment touché : le jeu en public avec accompagnement (pianiste).

Je vous explique brièvement le souci, je joue régulièrement en duo avec mon prof de piano en vu de se produire dans les maisons de retraites dont des dates ont déjà été posées d’ailleurs et ce week-end on a fait un petit test devant tous ses élèves et leurs parents. Les répétitions d’avant étaient bien et celle du matin superbe d’après les 2 spectateurs musiciens qui étaient présents. Bref, c’est avec confiance que je vais sur la scène pour jouer avec mon prof et là catastrophe, le son horrible, je ne me reconnaissais plus, bien sûr des petits tremblements mais encore ça je m’y attendais, les techniques d’archets sautées qui ne passaient pas du coup j’ai tout fait à la corde, la justesse qui swinguait beaucoup et pas à cause du vibrato Bref c’était pourri, du moins bien en deçà de ça que j’ai l’habitude de faire.

Toute cette histoire met en évidence quelques problèmes et je me demandais si vous aviez des conseils à apporter pour y remédier

Il y a la gestion du jeu avec l’autre (j’avais l’impression de n’avoir jamais joué avec mon prof), la gestion de son stress (avoir confiance en sa technique et ne pas tout changer au dernier moment par peur (c’en était jusqu’à la prise de l’archet qui était différente), et aussi sur la préparation de son violon (j’avais fait exprès de laisser mon violon dans la salle plusieurs pour qu’il s’y adapte mais ça n’a pas suffi visiblement).

Et je fais une petite extension, de manière global je vois que je joue avec moins de précision lorsque je suis avec mon prof de piano, même si nous ne sommes qu’entre nous « tranquille », et j’ai fortement l’impression que c’est dû au fait que je n’ai plus les mêmes repères sonores de sympathie, de résonance, d’écho que lorsque je suis tout seul (et sûrement parce que le tempo et les rythmes sont moins flex ahah). Et pareillement je me demandais si vous aviez des conseils pour jouer quasiment à l’aveugle, enfin plutôt « à la sourde » :p

[Cedin16]

Ce que tu viens de vivre est un très grand classique!
En fait il ne faut pas être a 100% mais a 200%
Tu dois être capable sous la douche de chanter la partition en mimant les bons coups d'archet en associant les doigts de la main gauche !
Comme les pilotes de la patrouille de France qui tu as certainement vu qui associent les déplacements de l'avion et un thème musicale et qui les répètent les yeux fermés au sol jusqu’à la synchronisation totale.
Il y aura toujours des imprévus , la sonorité de la salle , la réverbération il faut que ta technique puisse se dérouler tout en maitrisant les imprévus
se produire devant un publique .... c'est un métier

[LionelB]

Oui j’ai eu la même chose. Encore plus quand tu joues en solo devant un publique ! Grand moment de solitude potentiel.

Je n’ai que peu de conseils :

tout connaître par cœur. Pas seulement par cœur quand tu as ton violon dans les mains. Par cœur a un niveau où tu peux prendre une feuille vierge et écrire la partition. La différence entre ces 2 par cœurs a été pour moi une révélation. C’est la différence entre le risque de perdre le fil en plein concert et s’arrêter et perdre le fil mais se raccrocher.

Jouer de nombreuses fois en publique. Devant tes amis, ton chien, dans un parc etc…. À la dixième, tu es prêt à le faire en concert

[Piali]

wow, c'est très intéressant, je ne savais pas qu'il fallait connaître le morceau à ce point.
J'ai déjà fait les frais de ce trac infondé (jouant devant de très bons amis) ou déstabilisation, merci pour ces conseils

[LionelB]

Même pour une petite audition de conservatoire, le stress ressenti peut avoir un réel impact sur la capacité à jouer. Et peut être plus encore sur le comportement du cerveau. Sur sa capacité à se concentrer pleinement.

Dans ces moments il est difficile d’empêcher son cerveau de vagabonder. Par exemple, un bruit, un courant d’air froid, une variation de lumière, quelqu’un qui tousse, un bébé ou enfant qui s’agite, un souvenir qui remonte à la surface… tout ça risque d’attirer une partie de ton attention bien malgré toi.

Si tu ne connais le morceau que par mémoire physique (donc uniquement quand tu as le violon dans les bras), tu risques de perdre le fil et de pas réussir à te raccrocher. Par contre si c’est comme si tu avais la partition devant les yeux, tu peux te raccrocher à ça. Ensuite on est tous différent

Mon expérience la pire été en orchestre. Il y a quelques années. On jouait un concerto de Beethoven avec soliste. La soliste était notre chef d’attaque des premiers violons et pour ce morceau, elle se levait et moi je prenais sa place physiquement.

Un homme du public assis à environ 2 ou 3 m (sur le moment ça semble vraiment proche) m’a fixé du regard tout du long. Sans cligner des yeux et avec intensité. Je n’ai pas réussi à empêcher mon cerveau de se poser en boucle la question « mais qu’est ce qu’il me veut ? »). Et bien même avec la partition sous les yeux, j’ai réussi à faire des erreurs.

Alors imagine quand tu es seul exposé aux regards de la foule ? Il faut vraiment se préparer (pour moi un par cœur profond) puis s’exercer pour banaliser l’acte.

Pour le par cœur profond. Je découpe la partition en parties, puis les apprends par cœur dans les moments de temps libre (transport, pause au boulot etc…). Quand c’est bon, au moins une fois par jour (sous la douche, en marchand…) je m’affiche par imagination la partition devant les yeux. C’est en fait comme une image mentale. Que je joue dans ma tête en imaginant que j’ai le violon (mes mains esquissent à peine les gestes, mais tout est là quand même). Quand je maîtrise l’exercice les yeux fermés, alors je passe aux yeux ouverts.

Pour s’habituer aux perturbations extérieures : jouer à ses animaux de compagnie, puis sa famille, ses voisins, ou en ouvrant la fenêtre pour que la rue soit ton publique « invisible ». Ensuite il y a le stade du parc ou la forêt (prévoir un accompagnant pour gérer ses affaires).

Voilà c’est un long chemin… c est sûrement ce que veut dire Cedin16 pour être prêt à 200%. Ça parait excessif mais quand les perturbations de concert te tombent dessus, il te faut ça pour te raccrocher à ta concentration et limiter l’effet sur ton jeu.

Et vous, comment vous faites vous ?

[Cedin16]

Lionel
Nous sommes parfaitement synchro , même si jouer en extérieur n'a jamais fait partie de mes exercices.... a essayer
C'est la ou l'orchestre ou jouer en groupe est intéressant .... la musique n'attend jamais, elle continue , elle ne supporte aucun ralentissement ou aucune hésitation .. elle continue, il faut pouvoir continuer.
Combien de fois dans la journée je reprends mentalement une partie plus difficile plus complexe et je visualise les coups d'archet les doigts.
Pas plus tard qu'il y a deux semaines .. concert de fin d'année , je me suis retrouvé avec une contrebasse a hauteur de mon oreille droite a 1 m c'etait pas prévu... tu ne peux même pas penser a ce phénomène nouveau , ces vibrations que tu reçois dans le corps sinon tu es perdu.
J'ai joué quasiment comme un sourd pendant 20 min.
Je pense avoir déjà dit sur un post précédent , que je répétè souvent dans l’obscurité totale.... donc la partition je la connais .. par cœur ensuite cela me permet de me concentrer sur l'archet la conduite de l'archet , non pas visuellement mais dans le ressentie de la main, cela ma sauvé lors de ce dernier concert .. les nuances je ne les ai pas entendues , mais par contre je les ai faites ... elles étaient programmées dans ma main!

[LionelB]

Jouer dans le noir ? Moi, ça j’ai pas encore fais… et hop j’essaye ce soir et je te donne mes premières impressions

[Theo]

Merci pour vos retours d’expériences !
Elles me rappellent mes précédentes interventions en grand public il y a quelques années où ça c’était bien passé, et je me rappelle effectivement que j’étais effectivement capable de chanter le morceau, de faire les doigtés virtuellement dans la paume de ma main etc..
Choses que je n’ai pas chercher à faire cette fois, pendant que le morceau n’était pas suffisamment dur pour ça !

L’expérience vécue aura eu le mérite de remettre les idées en place ! Je vais essayer de retrouver les sensations dont vous parlez et de moins m’attacher au son grâce à vos astuces

Merci pour le partage !

Et concernant la qualité sonore sonore du violon, que faites vous pour qu’il soit lui aussi bien prêt le jour J ?

[LionelB]

A part l’accorder avant de partir, puis dans la salle et enfin juste avant de jouer une chtite retouche ? Rien

[Cedin16]

Avoir des cordes pas trop vieille pas trop neuve .
Ne pas avoir démonté une corde moins deux jours avant.
Ne jamais re mécher un archet moins d'une semaine avant .
Alors c'est des trucs que je m'impose perso , une cheville révisée même très bien révisée peu lâcher quelques jours âpres.
Et j'ai deja vu en plein concourt des mèches d'archets qui sautent car la cale de tête n’était pas parfaitement ajustée.
A mon age je ne sais plus si c'est de la raison ou de la superstition ... mais je m'y tiens .

[Theo]

Finalement l’avoir accommodé aux conditions de la salle n’a pas dû être une superbe idée. Surtout pour un temps de jeu réduit, il n’aurait pas eu le temps de trop bouger je pense.

[Claire91]

J'arrive un peu tard, mais voici quelques pistes de réflexion/travail :

Ma prof qui "enfonce des portes ouvertes", mais dont le conseil m'a fait faire un réel travail sur moi : "quand tu sens que tu deviens tendu, relâche les tensions".
Je veux dire, quand on se crispe, le son empire, du coup, on se crispe encore plus, du coup, c'est pire...
En prendre conscience. Se relâcher, se dire qu'on est là pour profiter du moment, que notre objectif est de partager cette belle musique...
Se dire que les gens ne sont pas là pour juger notre prestance ou notre technique mais pour partager une émotion. Et que toi tu es là pour PROFITER de ce partage.
On apprend à avoir ce cheminement de plus en plus rapidement pour "se reprendre".
Et bien sûr, c'est d'autant plus facile que tu connais parfaitement ton morceau (cf messages précédents).

Une technique personnelle dans les quelque jours-semaines avant la prestation :
1/ quand je file mon morceau chez moi, je visualise du public pour me mettre en condition de stress. Et en même temps, j'intègre mon lieu de travail. Il est rassurant, puisque je suis seule chez moi, sans "danger".
2/ quand je répète avec le pianiste, je crée une "bulle" avec lui. La musique est un échange entre lui et moi. La bulle nous protège d'un futur extérieur. L'échange bien mené sera perçu par le public.
3/ le jour J, je crée la bulle avec le pianiste (2) et me projette dans mon lieu de travail (1).

Ca demande une grosse concentration. Et dès que ma technique instrumentale sur le morceau est mise à mal, toutes ces bonnes idées s'evaporent, mais ça m'aide vraiment à gérer mon stress.

[Clas25+]

Mon conseil est que vous devez jouer davantage avec un accompagnement. Il est préférable de faire de l'exercice à un rythme plus lent à la maison. Je sais que c'est difficile, mais vous pouvez vous aider en utilisant les pages d'accompagnement. Je sais que ce n'est pas la même chose qu'un accompagnateur "live", mais cela vous préparera parfaitement à travailler avec lui. Vous vous débarrasserez d'un stress lorsque vous vous produisez en public. Il y a beaucoup de pages avec accompagnement, mais je recommande à mes élèves :
Xxxxxxxxxxx. Ceci est un site spécialisé pour les violonistes. Vous pouvez ralentir ou accélérer le tempo, pratiquer n'importe quelle partie de la chanson, et plus encore.

Édit : j’ai supprimé le lien car il renvoie vers un site en Pologne. Merci de vous présenter et d’expliquer ce lien pour éviter le bannissement.